Ah mais tu écris encore ? Oui connasse, c’est ce que ma sagacité avait à cœur de lui répondre mais rien n’est sorti comme tel. Là est mon plus grand chaos, avoir à supporter le décalage entre le labyrinthe cynique de mes réflexions et l’état minable de mes répliques. Chez moi, le fond et la forme dans leur station verbale sont un bordel terrible, faiblesse monumentale. Je me suis confondue en de troubles justifications, Écrire ? Je ne fais que cela, j’écris ici ailleurs j’écris sur des carnets sur mon ordinateur.
Je me souviens des affiches du Front National dans les rues de Vitrolles. C’était le milieu des années 1990, ils avaient recouvert les abri-bus, les parcs, les écoles et le parking des centres commerciaux. Je me souviens de la tête du bébé sur la photo. Sa mèche de cheveux fins tombait sur un front pâle. Ce bébé, il était adorable et touchant, un moyen de convertir à lui-seul en tradwives les nullipares syndiquées.
J’expérimente le crade, l’usure, les injustices réglées dans le vestiaire, les débats des allées, les voix qui râlent pour gagner le temps qui leur manquera forcément.
Cela fait plusieurs nuits que le sommeil m’échappe je le tiens d’abord fermement durant deux ou trois heures puis il se défait de moi s’enlève à mes bras s’extraie hors de mon cerveau en poussières de dodo
Durant les premières semaines, j’ai tant marché que j’ai eu la sensation que mes jambes se façonnaient dans la douleur, que mes pieds s’aiguisaient sous la lame d’un couteau de cuisine, à coup de hache, de burin dans les genoux, de pioche dans les fesses, de marteau dans le talon.
Tandis que la lumière de l’après-midi jaunit les tôles du hangar, je remarque quelques silhouettes bigarrées qui dansent sur les packs d’eau gazeuse. J’ai toujours trouvé cela superbe le saut furtif de la lumière dans la laideur, l’arc-en-ciel dans la flaque d’essence, sur les cartons les traits parfaitement droits du cutter rétractable, la poussière sur les poutres métalliques qui tombent en écailles de poissons.
Depuis 39 ans on fête mon anniversaire la veille de Noël pas par fétichisme ni par manque de temps mais le hasard du calendrier je faisais le poids d’une dinde quand je suis née c’était le repère soufflé aux absents depuis la maternité le poids d’une dinde.
ll y a tout juste un an le livre "Finistère" voyait le jour. Il met en lumière la richesse d’un territoire rural et océanique. On y parle de créativité, d’hospitalité, d’écologie, de gastronomie et d’hédonisme conscient. J’ai eu la chance de rédiger l’intégralité des textes et des 250 pages.
Extrait : Après son premier livre « Chroniques du royaume », la journaliste et surfeuse Elisa Routa s’est laissée emporter par la littérature. Jusqu’à partir en résidence à la Maison François-Méchain, en Charente-Maritime, pour écrire son premier roman.
À l’écrit, j’aime user de la grossièreté, ça me libère, ça me fait du bien, ça attrape, ça va chercher un truc en moi et ça le balance dehors. Ça fait des va-et-viens avec ce que je ressens, ça rebondit quand j’écris putain de merde. Vous avez senti l’écho en vous, en lisant Putain de merde ?