Résidence d’écriture, jour 25
Extrait de CV, rubrique centres d’intérêt sans intérêt, résidence d’écriture, jour 25 :
Je ne sais pas différencier le beurre de la margarine, et ne connais pas mon âge par cœur. Ça change trop souvent. J’ai une passion pour le verbe dégoupiller et la lessive à la main dans l’évier. Je m’attache aux gens dès qu’on me témoigne un peu d’attention, ce qui peut devenir problématique. Je m’attendris d’un scooter qui me suit dans le rétroviseur sur plusieurs kilomètres, et me sens tout à coup trahie quand il s’engouffre dans un virage sans même dire au revoir d’un hochement de casque. Heureusement en décembre au Cap Ferret, y’a personne dans les rétroviseurs. Je me trouve toujours plus à l’aise à l’intérieur des mots des autres, bien que mes propres poèmes me fassent quelques fois sourire : la face de poulpe en phase de poule. J’ai cette théorie selon laquelle seuls les pervers narcissiques sifflent sous la douche ou dans la rue. Au lycée, je me suis fait expulser trois jours pour détention de mauvaise beu. On avait dit à ma grand-mère que j’étais malade, elle n’en a jamais rien su et me reparle parfois de cette foutue gastro. Sur un rond-point de la ville où je suis née, il y a la statue d’un taureau en duel avec un toréador moulé dans un legging. Si on veut traverser le centre-ville, on est forcés de tourner autour de leurs testicules. Quand je suis toute seule dans une cabane, je ressens invariablement le besoin de me couper les cheveux. Et cela fait 25 jours que je suis toute seule dans une cabane. Je vous laisse imaginer la face de poulpe.